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« Vous tremblez ! » dit Mathilde à son compagnon ; « ne craignez rien, nous sommes près du but. »

Ils atteignirent le bas de l’escalier, et continuèrent d’avancer à tâtons le long des murs. À un détour, ils aperçurent tout à coup dans le lointain une pâle lumière, vers laquelle ils dirigèrent leurs pas : c’était celle d’une petite lampe sépulcrale qui brûlait incessamment devant la statue de Sainte-Claire ; elle jetait une sombre et lugubre lueur sur les colonnes massives qui supportaient la voûte, mais elle était trop faible pour dissiper les épaisses ténèbres où les caveaux étaient ensevelis.

Mathilde prit la lampe.

« Attendez-moi ! » dit-elle au prieur ; « je reviens dans un instant. »

À ces mots, elle s’enfonça dans un des passages qui s’étendaient dans différentes directions et formaient une sorte de labyrinthe. Ambrosio resta seul. L’obscurité la plus profonde l’entourait, et encourageait les doutes qui commençaient à renaître dans son sein. Il avait été entraîné par un moment de délire. La honte de trahir ses terreurs en présence de Mathilde l’avait poussé à les combattre ; mais à présent qu’il était abandonné à lui-même, elles reprenaient leur premier ascendant. Il tremblait à l’idée de la scène dont il allait être témoin : il ne savait pas jusqu’à quel point les illusions de la magie pouvaient faire effet sur son esprit : elles pouvaient le pousser à quelque action qui, une fois commise, rendrait irréparable la rupture entre le ciel et lui. Dans cet effrayant dilemme, il aurait voulu implorer l’assistance de Dieu, mais il sentait avoir perdu tout droit à une telle protection : il serait retourné avec joie au couvent, mais il avait passé sous tant de voûtes et par tant de détours, qu’il ne fallait pas songer à essayer de regagner l’escalier. Son