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et vous n’acceptez pas mes consolations ; vous avez des désirs, et vous m’empêchez de seconder vos desseins : c’est de cela que je me plains, et non de votre indifférence. J’ai renoncé aux droits de maîtresse ; mais rien ne me fera renoncer à ceux d’amie. »

« Généreuse Mathilde ! « répliqua-t-il en lui prenant la main, « combien vous vous élevez au-dessus des faiblesses de votre sexe ! Oui, j’accepte votre offre : j’ai besoin d’un conseiller, d’un confident ; j’en trouve toutes les qualités réunies en vous : mais seconder mes desseins — ah ! Mathilde ! ce n’est point en votre pouvoir ! »

« Ce n’est au pouvoir d’aucun autre que de moi, Ambrosio ; votre secret n’en est pas un por moi : j’ai observé d’un œil attentif chacun de vos pas, chacune de vos actions ; vous aimez. »

« Mathilde ! »

« Pourquoi me le cacher ? Ne craignez pas la jalousie mesquine où s’abaissent la plupart des femmes : mon âme dédaigne une si méprisable passion. Vous aimez, Ambrosio ; Antonia Dalfa est l’objet de votre flamme : je connais chaque détail de votre passion, chaque conversation m’a été répétée ; je suis instruite de votre tentative sur la personne d’Antonia, de votre désappointement et de votre renvoi de la maison d’Elvire. Vous désespérez maintenant de posséder votre maîtresse ; mais je viens raviver vos espérances, et vous indiquer le chemin du succès. »

« Du succès ? Oh ! impossible ! »

« À ceux qui osent, rien n’est impossible. Comptez sur moi, et vous pouvez encore être heureux. Le moment est venu, Ambrosio, où l’intérêt de votre bonheur et de votre tranquillité me force à vous révéler une partie de mon histoire, que vous ignorez encore. Écoutez, et ne