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sespèrent de sa vie. L’aide des hommes me manque : il ne me reste qu’à implorer la miséricorde divine. Mon père, tout Madrid retentit du bruit de votre piété et de votre vertu ; daignez vous souvenir de ma mère dans vos prières : peut-être elles décideront le Tout-Puissant à l’épargner ; et dans le cas où cela arriverait, je m’engage pendant les trois mois suivants à illuminer tous les jeudis la châsse de saint François en son honneur. »

« Oui-da ! » pensa le moine ; « voici que nous avons un second Vincentio della Ronda ; l’aventure de Rosario commença ainsi ; » et il souhaita en secret que celle-ci finît de même.

Il accéda à la demande. La solliciteuse le remercia de l’air le plus reconnaissant, et continua en ces termes :

« J’ai encore une faveur à solliciter ; nous sommes étrangères à Madrid ; ma mère a besoin d’un confesseur, et ne sait à qui s’adresser. On nous dit que vous ne quittez jamais le monastère, et ma pauvre mère, hélas ! est incapable d’y venir : si vous aviez la bonté, révérend père, de nous désigner une personne dont les sages et pieuses consolations puissent adoucir les angoisses de ma mère au lit de mort, ce serait rendre un service mémorable à des cœurs qui ne sont point ingrats. »

Le moine accueillit aussi cette nouvelle requête. En est-il qu’il eût pu refuser à des accents si enchanteurs ? La suppliante était si intéressante ! sa voix était si douce, si harmonieuse ! ses pleurs même lui seyaient, et son affliction semblait ajouter un nouveau lustre à ses charmes. Il promit de lui envoyer un confesseur le soir même, et lui demanda son adresse. L’autre dame lui présenta une carte où cette adresse était écrite ; puis elle se retira avec la belle solliciteuse qui, avant son départ, combla de bénédictions le bon prieur. Il la suivit des yeux jus-