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tion, et il ne paraissait pas probable qu’une ennemie aurait pris la peine de me procurer des moyens d’existence. Après tout, je penchais à croire que les desseins de la supérieure sur ma vie avaient été découvertes par quelqu’une des religieuses qui avaient pris parti pour moi ; qu’elle avait réussi à substituer un narcotique au poison ; quelle m’avait apporté de la nourriture pour me soutenir, jusqu’à ce qu’elle pût effectuer ma délivrance ; et qu’elle s’occupait de faire savoir mon danger à mes parents, et de leur indiquer les moyens de me tirer de prison. Mais pourquoi ces provisions étaient-elles d’une nature si grossière ? comment cette amie était-elle entrée dans le caveau à l’insu de l’abbesse ? et si elle y était entrée, pourquoi la porte était-elle si soigneusement fermée ? Ces réflexions me tenaient en suspens : pourtant cette idée était la plus favorable à mes espérances, et je m’y arrêtai de préférence.

« Mes méditations furent interrompues par un bruit lointain de pas ; ils n’approchaient que lentement ; des rayons de lumière brillèrent à travers les fentes de la porte. Incertaine si les personnes qui s’avançaient venaient me délivrer, ou si elles étaient conduites au caveau par quelque autre motif, je ne manquai pas d’attirer leur attention en criant au secours. Le bruit des pas se rapprocha ; la lumière devint plus vive. Enfin, avec un plaisir indicible, j’entendis la clef tourner dans la serrure ; persuadée que je touchais à ma délivrance, je volai vers la porte avec un cri de joie. Elle s’ouvrit ; mais toutes mes espérances de fuite s’évanouirent, quand parut l’abbesse, suivie des quatre mêmes nonnes qui avaient été témoins de ma mort supposée. Elles portaient des torches à la main, et me regardèrent dans un silence effrayant.

« Je reculai de terreur. L’abbesse descendit dans le ca-