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saient considérablement enfoncés dans la terre. Une lampe sépulcrale était suspendue à la voûte par un chaîne de fer, et répandait une sombre lueur. Des emblèmes de mort se voyaient de toute part : des crânes, des épaules, des jambes, et d’autres débris de squelettes étaient épars sur le sol humide. Chaque tombeau était orné d’un grand crucifix, et dans un coin s’élevait une statue en bois de sainte Claire. Je ne fis pas d’abord attention à ces objets ; une porte, seule issue du caveau, avait attiré mes yeux ; j’y courus, m’enveloppant des plis de mon linceul ; je la poussai, et à mon inexprimable épouvante, je la trouvai fermée en dehors.

« Je devinai sur-le-champ que l’abbesse s’était méprise sur la nature de la liqueur qu’elle m’avait forcée de boire, et qu’au lieu de poison elle m’avait administré un puissant narcotique. J’en conclus que, morte pour tout le monde, j’avais reçu les derniers devoirs ; et que, privée de tout moyen de faire connaître que j’existais, ma destinée était de périr de faim. Cette idée me pénétra d’horreur, non pas seulement pour moi, mais pour l’innocente créature qui vivait encore dans mon sein. Je tachai de nouveau d’ouvrir la porte, mais elle résista à tous mes efforts. Je rassemblai tout ce que j’avais de voix, et criai au secours. J’étais trop loin de toute oreille. Aucune voix amie ne répondit à la mienne. Un profond et lugubre silence régnait dans le caveau, et je désespérai de ma liberté. Ma longue privation de nourriture commença à me tourmenter. Les tortures de la faim étaient les plus douloureuses et les plus insupportables ; et elles semblaient augmenter à chaque heure qui passait sur ma tête. Tantôt je me jetais à terre et m’y roulais éperdue de désespoir : tantôt, me relevant, je retournais a la porte, essayant de la forcer, et je recommençais