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d’examiner les objets environnants ; quand je le fis, quelle terreur remplit mon sein ! Je me trouvai étendue sur une espèce de lit d’osier ; il avait six poignées, qui avaient dû servir aux nonnes à me porter au tombeau ; j’étais couverte d’un drap ; quelques fleurs fanées étaient éparses sur moi : d’un côté était un petit crucifix de bois ; de l’autre, un rosaire à gros grains ; quatre murs bas et étroits m’emprisonnaient ; le haut était fermé aussi d’une petite grille par où passait le peu d’air qui circulait dans ce misérable endroit. Une faible lueur qui m’arrivait à travers les barreaux me permettait de distinguer les horreurs dont j’étais entourée ; une odeur infecte et malsaine me suffoquait. Remarquant que la grille n’était point fermée, je pensai qu’il ne me serait pas impossible de m’échapper. Comme je me levais dans ce dessein, ma main se posa sur quelque chose de doux ; je le pris et l’approchai de la lumière. Dieu tout-puissant ! quel fut mon dégoût ! ma consternation ! en dépit de sa putréfaction et des vers qui la rongeaient, j’aperçus une tête humaine, et reconnus les traits d’une nonne qui était morte quelques mois auparavant, je la jetai loin de moi, et tombai presque sans vie sur ma bière.

« Quand la force me revint, cette circonstance et l’idée d’être au milieu des cadavres hideux de mes compagnes, accrut mes désirs de m’évader de mon affreuse prison. Je me redressai vers la lumière ; la grille était à ma portée, je la soulevai sans peine : probablement on l’avait laissée ouverte pour faciliter ma fuite. En m’aidant de l’irrégularité des murs, dont certaines pierres dépassaient les autres, je parvins à les escalader, et à sortir de ma prison. Je me trouvai dans un caveau assez spacieux ; plusieurs tombeaux, extérieurement semblables à celui dont je venais de m’échapper, étaient rangés sur les côtés, et parais-