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bonnes grâces ; elle y réussit aisément. Le duc vit sa beauté avec surprise et admiration ; et s’il eut les yeux enchantés de ses attraits, le charme de ses manières et son tendre intérêt pour la nonne souffrante lui gagnèrent le cœur. Virginie avait assez de discernement pour s’en apercevoir, et elle redoubla de soins pour la malade. Lorsqu’il la quitta à la porte du palais de son père, le duc demanda la permission de venir quelquefois savoir de ses nouvelles ; elle y consentit volontiers, et l’assura que le marquis de Villa-Franca serait fier de trouver une occasion de le remercier en personne de la protection qu’elle avait reçue de lui. Puis ils se séparèrent, lui, ravi de tant de beauté et de douceur, elle, enchantée de lui et surtout de son neveu.

En entrant au palais, la première pensée de Virginie fut de faire appeler le médecin de la famille, et de prendre soin de l’inconnue. Sa mère partagea avec empressement ses devoirs charitables. Alarmé de l’émeute, et tremblant pour la sûreté de sa fille, le seul enfant qu’il eût, le marquis avait volé au couvent de Sainte-Claire, et était encore occupé à la chercher. On envoya de tout côté des messagers pour lui apprendre qu’il la trouverait saine et sauve à son hôtel, et pour l’inviter à s’y rendre immédiatement. Son absence laissa à Virginie la liberté de donner toute son attention à sa protégée ; et quoique fort troublée elle-même des aventures de la nuit, aucune instance ne put la déterminer à quitter le lit de la malade. Celle-ci, dont la constitution avait été très ébranlée par le besoin et la douleur, fut quelque temps avant de recouvrer l’usage de ses sens. Elle eut une grande difficulté à avaler les remèdes qui lui furent ordonnés ; mais cet obstacle écarté, elle triompha aisément de sa maladie, qui ne provenait que de faiblesse. Les soins dont elle