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distinguait qu’une suite de degrés rudes et informes qui s’enfonçaient dans le gouffre béant, et se perdaient bientôt dans les ténèbres. On n’entendait plus de gémissements ; mais personne ne doutait qu’ils ne fussent sortis de cette fosse. En se penchant dessus, Lorenzo s’imagina distinguer quelque chose qui brillait dans l’ombre ; il regarda attentivement, et fut convaincu qu’il voyait une petite lueur qui se montrait et disparaissait tour à tour. Il le dit aux nonnes, et elles la virent aussi ; mais lorsqu’il annonça son intention de descendre dans le trou, elles se réunirent pour s’opposer à cette résolution. Toutes leurs remontrances ne purent la changer. Pas une d’elles n’eut le courage de l’accompagner, et il ne pouvait songer à les priver de la lampe. Seul donc, et dans les ténèbres, il se disposa à tenter l’aventure, tandis que les nonnes se contentaient de dire des prières pour son succès et sa sûreté.

Les marches étaient si étroites et si raboteuses, que les descendre c’était comme marcher sur la pente d’un précipice. L’obscurité qui l’environnait ôtait toute sûreté à son pied ; il était obligé d’avancer avec une grande précaution, de peur de manquer les marches et de tomber dans le gouffre : il en fut bien près plusieurs fois. Cependant il atteignit la terre ferme plus tôt qu’il ne s’y attendait ; il reconnut que les ténèbres épaisses et les brouillards impénétrables qui régnaient dans le souterrain le lui avaient fait croire beaucoup plus profond qu’il ne se trouvait l’être : il parvint sans accident au bas de l’escalier, s’arrêta et chercha la lueur qui avait attiré son attention. Il la chercha en vain ; tout était sombre. Il écouta si l’on gémissait ; mais son oreille ne distingua d’autre son que le murmure lointain des nonnes qui au-dessus répétaient à voix basse leurs Ave Maria. Il resta incertain de quel côté diriger ses pas. À tout événement, il résolut d’aller