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à ce singulier événement, et parcourait la statue avec des yeux scrutateurs : tout à coup ils s’arrêtèrent sur la main desséchée ; il fut frappé de l’idée qu’une défense si particulière de toucher le bras de la statue n’avait pas été faite sans motif ; il remonta sur le piédestal : il examina l’objet de son attention, et découvrit un petit bouton de fer caché entre l’épaule de la sainte et ce que l’on supposait avoir été la main du voleur. Cette découverte le ravit : il mit les doigts sur le bouton, et le pressa avec force : aussitôt un bruit sourd se fit entendre dans la statue comme une chaîne tendue qui se détacherait. Effrayées de ce bruit, les timides nonnes reculèrent, se préparant à fuir à la première apparence de danger ; mais tout redevenant calme et silencieux, elles se rassemblèrent de nouveau autour de Lorenzo, et le regardèrent agir, pleines d’anxiété.

Voyant qu’il n’était rien résulté de sa découverte, il descendit. Quand il retira sa main, la sainte trembla, et les spectatrices furent reprises d’effroi, croyant que la statue s’animait. Les idées de Lorenzo étaient toutes différentes ; il comprit aisément que le bruit qu’il avait entendu venait de ce qu’il avait lâché une chaîne qui attachait la statue au piédestal ; il essaya de nouveau de la remuer, et il y réussit sans de grands efforts : il la posa à terre, et remarqua que ce piédestal était creux et que l’entrée en était fermée par une lourde grille de fer.

La curiosité devint si générale, que les sœurs oublièrent leurs dangers réels et imaginaires. Lorenzo se mit à soulever la grille, et les nonnes l’aidèrent de toutes leurs forces ; ils en vinrent à bout sans beaucoup de peine. Alors il s’offrit à eux un abîme profond, dont l’œil cherchait en vain à percer l’épaisse obscurité. Les rayons de la lampe étaient trop faibles pour être d’un grand secours ; on ne