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plaire ; mais l’arrêt de la sainte ne s’en est pas moins exécuté ; et la tradition dit qu’il continue de hanter ce caveau et d’implorer le pardon de sainte Claire par ses plaintes et ses lamentations. Maintenant, j’y pense, celles que nous venons d’entendre pourraient fort bien avoir été poussées par l’ombre de ce pécheur ; mais ceci, je ne le garantis pas. Tout ce que je puis dire, c’est que depuis lors personne n’a osé toucher la statue ; n’ayez donc pas cette folle témérité, bon señor ; pour l’amour du ciel, abandonnez ce dessein, et ne vous exposez pas sans nécessité à une mort certaine. »

N’étant pas convaincu que sa mort serait aussi certaine qu’Hélène paraissait le croire, Lorenzo persista dans sa résolution. Les nonnes s’efforcèrent de l’en détourner dans les termes les plus touchants, et lui montrèrent même la main du voleur, qui, en effet, se voyait encore sur le bras de la statue. Cette preuve, s’imaginaient-elles, devait le persuader. Il s’en fallait de beaucoup, et elles furent grandement scandalisées lorsqu’il manifesta le soupçon que ces doigts secs et ridés avaient été mis là par l’ordre de l’abbesse. En dépit de leurs prières et de leurs menaces, il approcha de la statue. Il sauta par-dessus la grille de fer qui la protégeait, et la sainte subit un examen minutieux. Elle lui avait paru d’abord être de pierre ; mais une plus ample inspection lui prouva qu’elle n’était que de bois peint. Il la secoua et essaya de la remuer : mais elle avait l’air de faire partie de sa base. Il l’examina encore dans tous les sens ; mais aucun fil ne le conduisait à la solution de ce mystère, solution dont les nonnes étaient devenues aussi avides que lui, depuis qu’elles l’avaient vu toucher impunément la statue. Il s’arrêta et écouta : les gémissements se renouvelaient par intervalles, et il était convaincu d’en être le plus près possible. Il rêvait