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le dessein de l’examiner plus attentivement : mais lorsqu’elles virent son intention, les nonnes le supplièrent, au nom du ciel, d’y renoncer, car, s’il touchait la statue, sa mort était inévitable.

« Et en quoi consiste le danger ? » dit-il.

« Mère de Dieu ! en quoi ? » repartit Hélène, toujours empressée de raconter une aventure miraculeuse. « Si vous aviez seulement entendu la centième partie des merveilleuses histoires que la supérieure nous racontait à ce sujet ! elle nous a assurées mainte et mainte fois que si nous osions seulement y poser un doigt, nous courrions les plus grands risques. Entre autre choses, elle nous a dit qu’un voleur étant entré la nuit dans ces caveaux, remarqua le rubis qui est là, et dont le prix est inestimable. Le voyez-vous, señor ? il brille au troisième doigt de la main dans laquelle elle tient une couronne d’épines. Naturellement le bijou excita la cupidité de ce misérable. Il résolut de s’en emparer. Dans ce dessein, il monta sur le piédestal ; pour s’appuyer, il saisit le bras droit de la sainte et étendit le sien vers la bague ; quelle fut sa surprise, lorsqu’il vit la statue lever sur lui une main menaçante et lui annoncer sa damnation éternelle ! Pénétré d’effroi et de consternation, il se désista de sa tentative, et se disposa à quitter le caveau ; mais cet espoir aussi fut déçu : la fuite lui fut interdite, il lui fut impossible de dégager sa main qui était appuyée sur le bras droit de la sainte ; il eut beau faire des efforts, il resta attaché à la statue, jusqu’à ce que l’angoisse insupportable qui lui versait du feu dans les veines, le forçât de crier au secours. Le caveau se remplit de spectateurs ; le scélérat avoua son sacrilège, et pour le délivrer il fallut séparer sa main de son corps : elle est restée depuis attachée à la statue. Le voleur se fit ermite, et mena désormais une vie exem-