Page:Lewis - Le Moine, Tome 2, trad Wailly, 1840.djvu/149

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

une pierre sur l’autre. Alarmés à ce récit, ils coururent au couvent, décidés à le défendre s’il était possible, ou du moins à en sauver les habitantes de la furie des mutins. La plupart des nonnes avaient pris la fuite : mais quelques unes y étaient restées ; leur situation était vraiment dangereuse. Cependant, grâce à la précaution qu’elles avaient prise de barricader les portes intérieures, Lorenzo espéra contenir le peuple jusqu’à ce que don Ramirez revînt avec des forces suffisantes.

Entraîné par les premiers désordres à plusieurs rues de distance du couvent, il n’y parvint pas tout de suite. Quand il y arriva, la foule alentour était si considérable qu’il ne put approcher des portes. La populace cependant assiégeait le bâtiment avec rage et persévérance : elle battait les murs en brèche, jetait aux fenêtres des torches enflammées, et jurait qu’au point du jour pas une nonne de Sainte-Claire ne serait en vie. Lorenzo venait précisément de réussir à se frayer un chemin à travers la foule, lorsqu’une des portes fut forcée. Les mutins se répandirent dans l’intérieur du bâtiment, où ils exercèrent leur vengeance sur tout ce qui se trouva sur leur passage. Ils mirent en pièces le mobilier, déchirèrent les tableaux, détruisirent les reliques, et par haine de la servante perdirent tout respect pour la sainte. Les uns s’occupaient à chercher les nonnes, d’autres à démolir des parties du couvent, et d’autres à mettre le feu aux tableaux et au riche mobilier qu’il contenait. Ces derniers produisirent le plus réel dégât : en effet, les conséquences de leur action furent plus soudaines qu’eux-mêmes ne l’avaient attendu ou désiré. Les flammes, qui s’élevaient de ces monceaux en feu, atteignirent un côté du bâtiment qui était vieux et sec, et l’incendie gagna rapidement de chambre en chambre : les murs furent