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couvert d’un toit de pierre ; la division était marquée par une grille de fer, dont le guichet généralement n’était pas fermé à clef.

C’est là que Mathilde dirigea ses pas : elle ouvrit le guichet et chercha la porte qui conduisait aux caveaux souterrains où reposaient les os blanchissants des religieuses de Sainte-Claire. La nuit était entièrement sombre ; on ne voyait ni lune ni étoiles ; heureusement il n’y avait pas un souffle de vent, et le moine portait la lampe en pleine sécurité : à l’aide de sa clarté, la porte du sépulcre fut bientôt découverte ; elle se perdait dans le creux d’un mur, et était presque entièrement recouverte par d’épaisses touffes de lierre ; trois marches de pierre grossièrement taillées y conduisaient, et Mathilde était sur le point de les descendre lorsque soudain elle recula.

« Il y a quelqu’un dans les caveaux ! » dit-elle tout bas au moine ; « cachez-vous jusqu’à ce qu’on soit passé. »

Elle se réfugia derrière un grand et magnifique tombeau, érigé en l’honneur de la fondatrice du couvent ; Ambrosio suivit cet exemple, cachant avec soin sa lampe, dont la lueur les aurait trahis. Peu d’instants s’étaient écoulés lorsqu’on poussa la porte qui menait aux souterrains. Des rayons de lumière se projetèrent sur l’escalier, et permirent aux deux témoins cachés de voir deux femmes vêtues d’habits religieux, et qui paraissaient engagées dans une conversation animée. Le prieur n’eut aucune difficulté à reconnaître dans la première l’abbesse de Sainte-Claire, et une des nonnes les plus âgées dans sa compagne.

« Tout est préparé, » dit l’abbesse : « son sort sera décidé demain ; tous ses pleurs et ses soupirs ne serviront de rien. Non ! depuis vingt-cinq ans que je suis supérieure de ce couvent, jamais je n’ai vu de trait plus infâme ! »