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sirs. Soumis aux ordres de Mathilde, il n’alla point de tout le jour la voir dans sa cellule. Le père Pablos annonça, au réfectoire, que Rosario avait enfin consenti à suivre son ordonnance, mais que le remède n’avait pas produit le moindre effet, et que vraisemblablement aucune puissance humaine ne parviendrait à le sauver. Le prieur se rangea à cet avis, et affecta de déplorer la fin prématurée d’un jeune homme qui donnait de si belles espérances.

La nuit arriva. Ambrosio avait pris soin de se faire remettre par le portier la clef de la petite porte qui donnait sur le cimetière. Lorsque tout fut silencieux dans le monastère, il sortit de sa cellule et courut à celle de Mathilde. Elle avait quitté son lit, et s’était habillée avant qu’il n’arrivât.

« Je vous attendais avec impatience, » dit-elle ; « ma vie dépend de ce moment. Avez-vous la clef ? »

« Oui. »

« Allons vite au jardin ; nous n’avons pas de temps à perdre. Suivez-moi. »

Elle prit sur la table un petit panier couvert. Le portant d’une main et de l’autre tenant la lampe qui brûlait sur la cheminée, elle se hâta de sortir de la cellule. Ambrosio la suivit. Tous deux gardaient un profond silence. Elle marcha d’un pas rapide mais circonspect, traversa les cloîtres et gagna le côté occidental du jardin : ses yeux brillaient d’un feu sauvage qui pénétrait le moine d’une terreur respectueuse, et sur son front régnait le courage déterminé du désespoir. Elle donna la lampe à Ambrosio ; puis, lui prenant la clef, elle ouvrit la petite porte et entra dans le cimetière. C’était un carré vaste et spacieux, planté d’ifs : une moitié appartenait au couvent ; l’autre était la propriété des sœurs de Sainte-Glaire, et était