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turelle et tout insignifiante, la faisaient rougir de sa faiblesse. Dans de telles dispositions, le conte qu’elle venait de lire suffisait pour donner l’éveil à ses craintes ; l’heure et le lieu s’accordaient pour les autoriser ; c’était dans tout le silence de la nuit ; elle était seule, et dans la chambre de sa mère défunte ; il faisait un temps affreux ; le vent mugissait autour de la maison, les portes étaient ébranlées sur leurs gonds, et une pluie violente frappait contre les croisées : on n’entendait pas d’autre bruit. La bougie, brûlée jusqu’à la bobèche, tantôt, se redressant, jetait un rayon de lumière dans la chambre, et tantôt, retombant, semblait sur le point d’expirer. Le cœur d’Antonia battait d’émotion ; ses yeux erraient craintifs sur les objets environnants, quand la flamme tremblante les éclairait par intervalles ; elle essaya de se lever, mais ses membres tremblaient si fort qu’elle fut incapable d’avancer : elle appela Flora qui était dans une pièce peu éloignée ; mais l’émotion étouffa sa voix, et ses cris se perdirent en sourds murmures.

Elle passa quelques minutes dans cette situation, après quoi ses terreurs commencèrent à diminuer ; elle tâcha de se remettre et de retrouver assez de force pour quitter la chambre. Tout à coup elle crut entendre pousser près d’elle un faible soupir : cette idée la rejeta dans sa première faiblesse. Elle était déjà debout et sur le point de prendre sa lampe sur la table, le bruit surnaturel l’arrêta : elle retira sa main, et s’appuya sur le dos du fauteuil ; elle écouta avec anxiété, mais elle n’entendit plus rien.

« Bon Dieu ! » se dit-elle, « que pouvait être ce bruit ? Me suis-je trompée, ou l’ai-je réellement entendu ? »

Ses réflexions furent interrompues par une voix à peine distincte qui venait de la porte : c’était comme si quel-