sur sa harpe, était aisée et gracieuse : son capuchon retombé en arrière plus que de coutume, laissait voir deux lèvres de corail, fraîches, mûres, fondantes, et un menton dans les fossettes duquel semblaient se tapir des milliers d’amours. La longue manche de sa robe aurait traîné sur les cordes de l’instrument ; pour prévenir cet inconvénient, elle l’avait relevée au-dessus du coude : et de la sorte se trouvait découvert un bras de proportions exquises, et dont la peau délicate aurait rivalisé de blancheur avec la neige. Ambrosio n’osa la regarder qu’une fois ; mais ce regard suffit pour lui démontrer tout le danger de la présence de ce séduisant objet. Il ferma les yeux, mais il s’efforçait en vain de la bannir de sa pensée. Elle était toujours là devant lui, parée de tous les charmes que pouvait créer un cerveau échauffé ; toutes les beautés qu’il avait vues paraissaient embellies ; et celles qui étaient restées cachées, l’imagination les lui représentait sous des couleurs brûlantes ; cependant, ses vœux et la nécessité de les garder étaient encore présents à sa mémoire. Il luttait contre le désir, et frissonnait en voyant la profondeur de l’abîme ouvert devant lui.
Mathilde cessa de chanter. Redoutant l’influence de ses charmes, Ambrosio restait les yeux fermés et priait, implorant l’assistance de saint François dans cette dangereuse épreuve ! Mathilde crut qu’il dormait : elle quitta son siège, s’approcha doucement du lit, et resta quelques minutes à le contempler attentivement.
« Il dort ! » dit-elle enfin à voix basse ; mais le prieur l’entendait parfaitement « Maintenant je puis donc le regarder sans crime ; je puis mêler mon haleine à la sienne ; je puis me livrer à mon extase, sans qu’il me soupçonne d’impureté et du tromperie. Il craint que je ne l’entraîne à violer ses vœux. Oh ! l’injuste ! Si je songeais