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mienne. Nous sommes perdues toutes deux si vous découvrez mon imprudence à la supérieure. La punition que les lois de Sainte-Claire infligent aux infortunées qui ont commis ma faute est des plus sévères, des plus cruelles. — Digne, digne père ! que votre conscience irréprochable ne vous rende pas impitoyable pour ceux qui sont moins capables de résister à la tentation ! La miséricorde sera-t-elle la seule vertu dont votre cœur ne soit pas susceptible ? Pitié, très révérend père ! rendez-moi ma lettre, et ne me condamnez pas à une mort inévitable ! »

« Votre audace me confond ! — Moi, cacher votre crime — moi, que vous avez abusé par une fausse confession ! Non, ma fille, non, je veux vous rendre un service plus essentiel ; je veux vous racheter de la perdition, en dépit de vous-même. La pénitence et la mortification laveront votre offense, et la sévérité vous ramènera de force dans les voies de la sainteté. Holà ! mère sainte Agathe ! »

« Mon père ! par tout ce qui vous est sacré, par tout ce qui vous est cher, je vous supplie, je vous conjure — »

« Laissez-moi ! je ne vous écouterai pas. — Où est la supérieure ? Mère sainte Agathe, où êtes vous ? »

La porte de la sacristie s’ouvrit, et l’abbesse, suivie de ses nonnes, entra dans la chapelle.

« Cruel ! cruel ! » s’écria Agnès, lâchant prise.

Éperdue, elle se jeta par terre, se frappant le sein et déchirant son voile dans tout le délire du désespoir. Les nonnes contemplaient avec étonnement cette scène. Le prieur présenta le fatal papier à la supérieure, l’informa de la manière dont il l’avait trouvé, et ajouta que c’était à elle de décider quel châtiment la coupable méritait.

À la lecture de cette lettre, les traits de l’abbesse s’enflammèrent de courroux. Quoi ! un tel crime commis dans