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un mystère impénétrable, et je commençai à abandonner tout espoir de la retrouver.

« Il y a environ huit mois, je revenais à mon hôtel, l’humeur mélancolique, après avoir passé la soirée au spectacle. La nuit était sombre, et j’étais sans suite ; plongé dans des réflexions qui étaient loin d’être agréables, je ne m’aperçus que trois hommes m’avaient suivi depuis le théâtre que lorsqu’au détour d’une rue déserte, ils m’attaquèrent tous à la fois avec une furie extrême. Je reculai de quelques pas, je tirai l’épée et jetai mon manteau sur mon bras gauche ; l’obscurité de la nuit me favorisait. Pour la plupart, les coups des assassins étant portés au hasard, ne réussirent pas à m’atteindre ; enfin je fus assez heureux pour étendre à mes pieds un de mes adversaires ; mais avant cela j’avais déjà reçu tant de blessures et j’étais pressé si chaudement, que ma perte aurait été inévitable si le cliquetis des épées n’eût attiré un cavalier à mon aide. Il courut vers moi l’épée nue ; plusieurs domestiques le suivaient avec des torches : son arrivée rendit le combat égal. Pourtant les spadassins ne voulurent abandonner leur dessein que lorsque les valets furent sur le point de nous rejoindre. Alors ils s’enfuirent, et nous les perdîmes dans l’obscurité.

« L’étranger s’adressa à moi avec politesse, et s’informa si j’étais blessé. Affaibli par la perte de mon sang, je pus à peine le remercier de son assistance opportune et le jurer de me faire porter par quelques uns de ses gens à l’hôtel de Las Cisternas. Je n’eus pas plus tôt prononcé ce nom qu’il se donna pour une connaissance de mon père, et déclara qu’il ne permettrait pas que je fusse transporté à une telle distance avant qu’on eût examiné mes blessures. Il ajouta que sa maison était tout près de là, et me demanda de l’y accompagner. Ses instances