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sage au travers de la foule, et parvint à se pousser au beau milieu de l’église, à une très petite distance de la chaire. Sa compagne l’avait suivie timidement et en silence, ne faisant que profiter de ses efforts.

« Sainte Vierge ! » s’écria la vieille d’un air désappointé, tout en cherchant de l’œil autour d’elle ; « sainte vierge ! quelle chaleur ! quelle foule ! qu’est-ce que cela veut dire ? Je crois qu’il faudra nous en retourner : il n’y a pas l’ombre d’un siège vacant, et je ne vois personne d’assez obligeant pour nous offrir le sien. »

Cette insinuation peu équivoque éveilla l’attention de deux cavaliers qui occupaient des tabourets à droite, et avaient le dos appuyé contre la septième colonne à compter de la chaire. Tous deux étaient jeunes et richement vêtus. À cet appel fait à leur politesse par une voix de femme, ils suspendirent leur conversation pour regarder qui parlait. La vieille avait relevé son voile pour faciliter ses recherches dans la cathédrale. Ses cheveux étaient roux, et elle louchait. Les cavaliers se retournèrent et reprirent leur conversation.

« De grâce, » repartit la compagne de la vieille, « de grâce, Léonella, retournons tout de suite chez nous ; la chaleur est excessive, et je me meurs de peur au milieu de cette foule. »

Ces paroles avaient été prononcées avec une douceur sans égale. Les cavaliers interrompirent de nouveau leur entretien ; mais, cette fois, ils ne se contentèrent pas de regarder : tous deux se levèrent involontairement de leurs sièges, et se tournèrent vers celle qui venait de parler.

C’était une personne dont la tournure élégante et délicate inspira aux jeunes gens la curiosité de voir sa figure. Ils n’eurent pas cette satisfaction. Ses traits étaient cachés par un voile épais ; mais sa lutte avec