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pelez-vous ce qui est dû par vous à l’honneur, par moi au baron, et remplacez par l’estime et l’amitié des sentiments que je ne puis jamais payer de retour. »

« La baronne pâlit à cette déclaration imprévue et positive : elle doutait si elle dormait ou si elle était éveillée. Enfin, revenant de sa surprise, la consternation fit place à la rage, et le sang reflua vers ses joues avec violence.

« Infâme ! » s’écria-t-elle ; « monstre de fourberie ! c’est ainsi que tu reçois l’aveu de mon amour ? C’est ainsi que — mais non, non ! cela ne peut être ! cela ne sera pas ! Alphonso, voyez-moi à vos pieds ! Soyez témoin de mon désespoir ! Jetez un regard de pitié sur une femme qui vous aime d’une affection sincère ! Celle qui possède votre cœur, comment a-t-elle mérité un tel trésor ? Quel sacrifice vous a-t-elle fait ? En quoi est-elle au-dessus de Rodolpha ? »

« Je lâchai de la relever.

« Pour l’amour de Dieu, señora, modérez ces transports ; ils nous déshonorent tous les deux. Vos exclamations peuvent s’entendre ; votre secret peut être connu de vos gens. Je vois que c’est ma présence qui vous irrite ; permettez-moi de me retirer. »

« Je me disposais à quitter l’appartement : la baronne me retint tout à coup par le bras.

« Et quelle est cette heureuse rivale ? » dit-elle d’un ton menaçant ; « je veux savoir son nom, et quand je le saurai — elle doit être sous ma dépendance ; vous sollicitiez ma bienveillance, ma protection ! Que je la trouve, que je sache quelle est celle qui ose me voler votre cœur, et elle souffrira toutes les tortures que la jalousie et le désappointement peuvent inventer. Qui est-elle ? répondez-moi à l’instant. N’espérez pas la soustraire à ma vengeance ! Je vous entourerai d’espions.