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ter mon aventure au baron. Par eux, je sus que les voleurs avaient été atteints. Le crime et le vrai courage sont incompatibles : ils s’étaient jetés aux pieds de leurs adversaires, ils s’étaient rendus sans coup férir, avaient découvert leur retraite, trahi le signal au moyen duquel on s’emparerait du reste de la troupe ; bref, ils avaient donné toutes les preuves possibles de lâcheté et de bassesse. De cette manière, toute la bande, composée d’environ soixante personnes, avait été prise, garrottée et conduite à Strasbourg. Quelques-uns des soldats avaient couru à la cabane, ayant pour guide un des bandits. Leur première visite avait été à la funeste grange, où ils avaient eu le bonheur de retrouver deux des valets du baron encore en vie, quoique bien dangereusement blessés. Le reste avait expiré sous les coups des voleurs, et de ce nombre était mon pauvre Stéphano.

« Alarmés de notre évasion, les voleurs, dans leur empressement de nous atteindre, avaient négligé de visiter la cabane : les soldats trouvèrent donc les deux femmes de chambre saines et sauves, et ensevelies dans le même sommeil de mort qui pesait sur leur maîtresse. On ne découvrit personne autre dans la cabane, si ce n’est un enfant qui n’avait pas plus de quatre ans, et que les soldats emmenèrent. Nous nous épuisions en conjectures sur la naissance de ce petit infortuné, lorsque Marguerite s’élança dans la chambre avec l’enfant dans ses bras. Elle tomba aux pieds de l’officier qui nous faisait ce rapport, et le bénit mille fois d’avoir sauvé son fils.

« Après les premiers transports de la tendresse maternelle, je la priai de nous expliquer comment elle avait été unie à un homme dont les principes semblaient en si complet désaccord avec les siens. Elle baissa les yeux, et essuya quelques larmes.