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moins de quatre-vingts tercets et un quatrain, qu’elle fut écrite par Cervantes, dans sa prison, la deuxième année de sa captivité. Les vingt et un derniers tercets et le quatrain final se trouvent tels quels, à quelques variantes près, dans une des premières comédies de Cervantes (El Trato de Argel, Jornada Ia, récit de Saavedra). Il n’y a pas par conséquent à douter de l’authenticité de cette pièce, si curieuse et si précieuse par les détails qu’on y remarque. M. Antoine de Latour en a donné le premier en français un extrait considérable, dans un récent volume d’Études littéraires sur l’Espagne contemporaine[1]. Nous avons traduit l’épitre intégralement, malgré les difficultés d’interprétation, qui ne sont pas petites et qui rendent inabordable la lecture des poëtes espagnols aux étrangers qu’une longue étude n’a point préparés à les bien entendre.

Les éditeurs de la petite édition populaire du Don Quichotte ont inséré sous le no 2 de leur appendice deux sonnets inédits de Cervantes, composés durant sa captivité, à l’occasion d’un ouvrage en italien, Sopra la desolatione della Goletta e Forte di Tunisi, dont la dédicace porte la date du 3 février 1577, par un autre captif, Bartolomeo Ruffino, de Chambéry. Ces deux sonnets ont été communiqués aux éditeurs de Don Quichotte, par M. A. Ripa de Meana, conservateur de la bibliothèque de S. A. R. le duc de Gênes, d’après un manuscrit du temps. Nous emprunterons au second sonnet le dernier tercet que Cervantes appliquait à son compagnon d’esclavage, pour le lui appliquer à lui-même, qui sut à la fois déployer les hautes qualités de sa grande âme et les ressources infinies de son esprit, si riche en in-

  1. Chez Michel Lévy. Paris, 1864, à l’article xi : « Le 247e anniversaire de Cervantes, » p. 356–361.