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LXVI

ments. — Celui qui marche comme vous avec un pareil guide, le vulgaire aveugle et grossier peut-il s’étonner que sa place soit si proche du siége le plus élevé ? — Comme rien ne se fait sans travail, marcher sans la vertu, c’est aller à l’aventure ; mais celui-là abrége le chemin qui fait route avec elle. — Si l’expérience ne m’abuse, je crois que nombre de gens ne sont tourmentés que d’une pensée, d’un désir unique. — Les prétendants abondent : ceux-ci songent à la clef d’or[1], beaucoup à un même emploi, et tel aspire à une ambassade, mission de confiance. — Chacun vise pour son compte au but que mille autres veulent atteindre, et il n’y en a qu’un dont le trait porte juste au point visé. — Et celui-là peut-être ne fut jamais importun et ne se trouva jamais à la porte d’un orgueilleux favori, encore à jeun après vêpres ; — il ne prêta, n’eut jamais à emprunter de l’argent ; et n’ayant de commerce qu’avec la vertu, en Dieu seul et en elle il avait confiance. — C’est de vous, seigneur, que l’on pourrait dire (et je le dis et le répéterai sans me taire) que la vertu seule fut votre guide ; — et qu’elle seule a suffi et a été assez puissante pour vous élever à ce haut poste que vous occupez maintenant, modeste favori dénué d’ambition. — Heureuse et bienheureuse fut l’heure où l’intelligence royale eut connaissance de ce mérite qui réside et demeure — dans votre calme esprit, dont la fidélité et la discrétion sont la base de vos talents. — Vos pas ne mesurent que le sentier, le chemin le plus parfait, celui qui est entre les extrêmes et qu’approuve la saine raison. — Celui qui marche dans cette voie, nous le voyons arriver à ce terme où

  1. Insigne des gentilshommes de la chambre, des grands d’Espagne qui avaient leurs entrées au palais.