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LII

testamentaires, désigna lui-même le lieu de sa sépulture, et mourut comme un homme fort et croyant, le 23 avril de l’année 1616. Il avait vécu soixante-huit ans, six mois et quatorze jours. Il fut enterré sans pompe, et, selon ses dernières volontés, dans l’église des religieuses de la Trinité, où sa fille doña Isabel avait pris le voile. Aucune inscription ne fut gravée sur sa tombe, aucun signe n’en marqua la place, si bien que l’Espagne, dont il est la plus belle gloire, ne sait pas où repose sa cendre.

Plus de deux siècles après sa mort, aucun monument ne rappelait sa mémoire, lorsque la maison où il était décédé, à Madrid, fut rebâtie, il n’y a pas trente ans, dans la rue qui porte actuellement son nom. On fit placer un buste sur la façade et graver une inscription commémorative. Ce fut seulement en 1835 que Ferdinand VII ordonna l’érection d’une statue de Cervantes sur une des places de la capitale. La statue fut coulée en bronze, à Rome, par le sculpteur Solá, de Barcelone. L’idée de cette réparation tardive n’appartenait pas au roi ; c’est un littérateur distingué qui avait pris l’initiative, M. Mesonero Romanos, le même qui demande grâce aujourd’hui pour la maison de Calderon, située dans la grand’rue de Madrid (calle Mayor) dont elle est à coup sûr le plus bel ornement. Puisse son intervention être assez efficace pour arrêter à temps le marteau des démolisseurs. Dans un pays où les préjugés sont si vivaces, il semble qu’on devrait respecter