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XLIV

gré son âge avancé, prit part au concours ou joute littéraire ouverte pour célébrer la béatification de sainte Thérèse par le pape Paul V.

Il composa, sur le modèle de la première églogue de Garcilaso, des stances remarquables par la tendresse des sentiments et par l’harmonieuse élégance des vers. Elles furent publiées, à la place d’honneur, dans le recueil des pièces couronnées. Lope de Véga était du nombre des juges, et parmi les concurrents se trouvaient les premiers poëtes d’alors.

Le but des nouvelles était tout moral ; leur titre même l’indiquait. Dans son Voyage au Parnasse, qui parut à la fin de la même année (1614), Cervantes se proposa d’arrêter les progrès du mauvais goût, qu’entretenait la détestable école de don Luis de Góngora, dont l’influence fut aussi funeste en Espagne que celle de son contemporain, Marini, le fut en Italie. Ce petit poëme, très-ingénieux, est en même temps une satire très-fine. Pour se délivrer des mauvais poëtes qui assiégeaient le Parnasse, Apollon appelle les bons à son secours ; il dépêche Mercure, et celui-ci choisit Cervantes pour savoir ceux qu’il doit emmener. À cette occasion, on voit défiler successivement tous les poëtes de quelque mérite, parmi lesquels Cervantes figure comme le plus pauvre et le plus malheureux. Deux petites pièces en prose, ajoutées au poëme, complètent cet innocent jeu d’esprit. Cependant, tout innocent qu’il était, et malgré l’indulgence qui règne partout, ce jeu d’es-