Page:Levoyageauparnas00cerv.djvu/435

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 249 —

service du duc d’Albe. Il se maria quelque temps après et se fit exiler à Valence, à la suite d’un duel. De retour à Madrid, il perdit sa femme, et, dans son désespoir, il s’engagea dans l’Armada qui allait envahir l’Angleterre. Il perdit, dans cette désastreuse expédition, son frère qui était officier de marine. Il revint à Madrid et fut successivement secrétaire du marquis de Malpica et du comte de Lémos. Il épousa en secondes noces doña Juana de Guardio. Il en eut un fils qui mourut très-jeune et une fille qui devait être son héritière. Ayant perdu sa seconde femme, il se fit prêtre, entra dans la confrérie des prêtres natifs de Madrid, fut comblé d’honneurs par le pape Urbain VIII, et devint un des familiers de la sainte Inquisition. Il mourut au milieu de ses travaux et de ses exercices de piété, le 25 août 1635, dans sa soixante-treizième année. Lope de Vega, qui jouit de son vivant d’une immense popularité, fut enterré comme un monarque, aux frais du duc de Sesa. Ces funérailles magnifiques étaient comme le dernier reflet de sa gloire. Lope de Vega, abusant de sa facilité prodigieuse, écrivit, comme il en convient lui-même, trop de sottises pour complaire au public ; et en lisant le recueil immense et surtout incomplet de ses œuvres, on constate que la plupart de ces œuvres ne sont pas viables. Lope de Vega vivait en quelque sorte au jour le jour. On peut dire de lui qu’il mangea son fonds avec son revenu, et son nom n’est plus qu’un souvenir, le symbole d’une fécondité incroyable. Sauf quelques comédies, qui ne sont pas d’ailleurs parmi les meilleures du théâtre espagnol, sauf ses poésies légères dont quelques-unes sont charmantes, Lope de Vega n’a point laissé une de ces œuvres maîtresses qui recommandent un homme à l’éternel souvenir des générations. Cervantes l’a excellemment