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seignait dans la première université de l’Espagne : les mathématiques, la médecine, la jurisprudence et même un peu de théologie. De son propre aveu, il avait étudié pendant quarante ans dans ces deux célèbres universités et professé pendant vingt ans. Silveyra était donc un savant docteur ; mais la réputation qu’il s’était faite dans les écoles ne suffisait point à contenter son ambition. Chargé d’un lourd bagage scientifique, il prétendit au laurier du Tasse, et consacra près du tiers de sa vie à la composition d’un poëme épique dans le genre de la Jérusalem délivrée. Le poëme parut en 1638 sous ce titre : « El Macabeo » (Naples, in-4). Le privilége ou permis d’imprimer atteste que l’auteur vivait encore à cette époque ; de sorte qu’il faut rejeter l’assertion de Barbosa, qui fait mourir Silveyra en 1636. Avant de se mettre à l’œuvre, Silveyra avait soumis son dessein aux écrivains et poëtes les plus recommandables de l’Italie et de l’Espagne. Il s’explique lui-même à ce sujet dans la préface de son poëme, et à sa façon de dire on voit aisément qu’il connaissait à fond les règles de l’art ; mais on devine aussi qu’il n’était pas inspiré. Le poëme n’a pas moins de vingt chants ; il est en octaves. Le sujet était beau et de nature à séduire un vrai poëte ; on sait que le Tasse lui-même s’en était emparé et qu’il l’abandonna ensuite. Silveyra le traita médiocrement. Faute d’invention et de variété, son œuvre languit, elle paraît longue, et le style ne compense pas malheureusement la pauvreté du fond ; le poëte ayant adopté la manière prétentieuse de Góngora. Cependant le Machabée eut un prodigieux succès. Un autre juif converti, Antonio Enriquez Gómez, auteur d’un autre poëme épique du même genre (Sanson Nazareno), n’hésite point à classer Silveyra parmi les quatre grands poëtes