Page:Levoyageauparnas00cerv.djvu/375

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
— 189 —

comme desservant de la paroisse Saint-André. Ce solitaire nourrissait dans son cœur un amour idéal, « honesto, santo y divino », comme il dit, pour une dame qu’il a célébrée sous des noms symboliques, à la manière de Dante et de Pétrarque. Herrera, qui avait plus d’un trait de ressemblance avec ce poëte raffiné, était fort savant. Il connaissait à fond les anciens et les auteurs italiens. Il a consigné en quelque sorte le fruit de ses méditations et de ses immenses lectures dans son commentaire de Garcilaso de la Vega (Séville, 1580).

Francisco Sanchez de las Brozas, qui était pourtant un érudit, avait commenté plus sobrement le premier ou le prince des poëtes espagnols de son temps, comme on disait alors. Mais l’érudition était à la mode lorsque parut le commentaire de Herrera, et il n’eut par la suite que trop d’imitateurs. Les commentateurs qui abondaient en Italie, fourmillaient en Espagne ; bientôt le moindre poëtereau fut commenté et longuement expliqué. Herrera préludait par ce commentaire à la publication de ses propres poésies, qui parurent à Séville en 1582. La diction de Herrera est irréprochable, car il limait ses vers et les repolissait sans cesse ; mais sa poésie est beaucoup plus savante que spontanée : on y sent trop l’imitation des grands lyriques de l’antiquité. La prose de Herrera est très-belle, très-sévère. Ce poëte avait presque du génie comme historien. On cite comme des morceaux classiques sa relation de la guerre de Chypre et le récit de la bataille de Lépante, Séville, 1572. Herrera avait écrit une histoire générale d’Espagne depuis les premières origines jusqu’à Charles-Quint. Cet ouvrage et quelques autres qui sont mentionnés par le célèbre archéologue sévillan Rodrigo Caro sont perdus. Le