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négliger l’étude de la jurisprudence, il se livra avec passion à la culture des belles-lettres, et bientôt il suivit son inspiration poétique. Ses premiers essais révélèrent un poëte satirique. Le mérite de ses poésies légères le mit de bonne heure en évidence. Cervantes parle de lui comme d’un auteur en réputation, dans le chant de Calliope de sa Galatée (1584) :

En don Luis de Góngora os ofrezco
Un vivo raro ingenio sin segundo:
Con sus obras me alegro y enriquezco,
No solo yo, mas todo el ancho mundo.

Góngora avait alors vingt-trois ans, et résidait à Cordoue, presque dans la misère. Il était âgé de quarante-cinq ans environ, lorsqu’il résolut de changer d’état. Il se fit prêtre, et bientôt après il se rendit à Valladolid, où était la cour. Il n’y trouva pas la fortune ; mais la poésie l’aida à supporter sa pauvreté. Il y a beaucoup de vers de lui dans le recueil poétique d’Espinosa, qui parut en 1605. Il perdit ainsi onze années en démarches ; les grands personnages qui l’avaient appelé ou attiré à la cour se contentèrent d’honorer son mérite sans le récompenser : « Llamado don Luis, entre esta cortedad de suerte, de grandes principes á esta corte, los gozó familiares mucho, beneficos poco, » remarque sentencieusement un de ses biographes. Il obtint néanmoins de la faveur du duc de Lerme et de l’amitié du marquis de Siete Iglesias, le titre d’aumônier ou chapelain honoraire du roi, et de la protection du comte-duc de Sanlucar, l’ordre de Saint-Jacques pour deux de ses neveux. Olivarès s’était déclaré son protecteur, et Góngora était sur le point de voir sa fortune s’améliorer sous l’influence du tout-puissant ministre, lorsqu’il tomba gravement malade. Il alla mourir dans sa ville natale, à