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clara son protecteur, don Pedro Fernandez de Castro, comte de Lémos. Mais l’agitation de la cour ne convenait guère à cet esprit méditatif ; il la quitta pour se rendre à Salamanque. Dans cette ville dont l’université était encore florissante, il se livra tout entier à la culture des lettres, et mit à profit ses loisirs pour préparer son histoire de la conquête des Moluques, publiée en 1609. Enfin, il résolut de passer le reste de sa vie à Saragosse, et de jouir dans cette capitale de l’Aragon de sa prébende (il était chanoine de la cathédrale) et de la fortune que lui avait laissée son père. Mais il avait compté sans son Mécène, le comte de Lémos, qui venait d’être nommé à la vice-royauté de Naples, et qui emmenait avec lui comme secrétaire, le frère aîné, Lupercio. Bartolomé fut obligé de partir, et il devint un des plus brillants ornements de cette cour, qui était comme une colonie littéraire de l’Espagne au pied du Vésuve. Bartolomé partagea les travaux de son frère, jusqu’à la mort de ce dernier en 1613, et s’acquit une grande réputation en Italie, particulièrement à Naples et à Rome. Bartolomé était dans sa cinquantième année, lorsqu’il rentra en Espagne à la suite de l’ancien vice-roi, son maître. Il se rendit sans retard à Saragosse, où l’appelaient et son canonicat et les fonctions honorables d’historiographe de la couronne d’Aragon, qui lui avaient été confiées par les états du royaume, durant son séjour à Naples. Bartolomé de Argensola succédait dans cette charge à un savant antiquaire, le docteur Bartolomé Llorente. Mais l’histoire ne lui fit pas oublier la poésie, et il continua dans sa retraite studieuse, à cultiver les muses, comme on disait autrefois, jusqu’au moment où la goutte, qui le tourmentait depuis bien des années, le mit au tombeau, à l’âge d’environ soixante-six ans, en