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poussant des gémissements au lieu de cris. Il parvint néanmoins à dire en paroles assez mal articulées : « Ô maîtresse de Paphos et des deux autres îles déjà nommées, prends-moi en pitié ; comme tu vois, je suis perclus des pieds et des mains, et je me noie dans d’autres eaux que celles de la cruche. Ici se dressera mon bûcher, ici se consumeront mes cendres, ici sera enseveli Quincoces, dont l’éducation fut dirigée par un pédagogue. »

Voilà ce que dit le pauvret ; et la déesse attendrie par sa supplique, se remit à arranger son vertugadin. Puis elle se redresse, et d’un air tendre, fixant les yeux sur le vieillard, elle fait jouer l’organe de la voix ; et d’un air à la fois dédaigneux et fâché, tempérant sa colère par une gravité douce, elle dit des choses qui mirent dans l’embarras la divinité aquatique. Son discours ne fut pas long ; et toutefois elle trouva moyen de lui rappeler son origine et sa parenté. Elle lui fit sentir combien était chétive la gloire de triompher de ces misérables vaincus. Et lui, répondit : « Si les destins immuables n’eussent dicté la sentence fatale, contre ces gens obstinés dans leur ignorance, rien qu’une ombre de votre présence, dame de beauté, eût suffi pour contenir ma rigueur. Mais il est maintenant trop tard ; et l’heure est venue de montrer combien est rude dans la victoire ma main indulgente et pacifique. Ces rimeurs, toujours inhumains dans leurs procédés, n’ont-ils pas dans leurs