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engendre les perles. À son gré, les fleuves hâtent ou suspendent leur course, et le cœur s’emporte à la colère ou revient à la douceur. Parmi les armes brillantes, elle se précipite, dans la fureur du combat, donnant ou ôtant la victoire. Les forêts lui prêtent leurs ombrages, les bergers leurs chansons, le malheur son deuil et le plaisir ses fêtes. Le sud lui prodigue ses perles, la région de Saba ses parfums, le Tibre son or, l’Hybla son miel, Milan ses brillants costumes, et la Lusitanie ses amours. Enfin, elle est un abrégé de l’utile, de l’honnête et de l’agréable, éléments essentiels du bonheur. Si vif et si merveilleux est son génie, qu’elle a des traits qui émerveillent par un je ne sais quoi d’impénétrable. Les gens de bien écoutent sa voix avec ravissement, les méchants s’en offensent ; c’est que les uns l’adorent, tandis que les autres ne la comprennent point. Ses œuvres héroïques sont immortelles, et ses œuvres lyriques tellement suaves, qu’elles transforment les faits périssables et leur impriment une divine empreinte. Si parfois elle se montre flatteuse, elle met dans ses flatteries tant d’élégance et de raffinement, qu’elle mérite récompense au lieu de blâme. Ses actes glorifient la vertu et châtient le vice, et c’est par là que se révèlent au monde son génie sublime et sa bonté. »

Il en était là de son explication, lorsqu’à travers des portiques de jasmins et de roses, parmi lesquels l’Amour errait sans doute, je découvris cinq personnages d’un aspect