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XI

sante encore, cette influence de la renaissance des lettres, qui s’étendit de là sur toute l’Europe.

Il y passa six ans, pendant lesquels son temps fut partagé entre les exercices de sa profession et l’étude assidue des écrivains et des poëtes de l’Italie. Ce fut alors qu’il acquit cette profonde connaissance de la littérature italienne, qui féconda son génie et l’inspira si heureusement. L’Arioste était son auteur de prédilection. Dans cet agréable conteur il admirait, il aimait surtout ces qualités solides et brillantes qui devaient faire le charme de ses propres écrits : l’invention facile et inépuisable, la pureté et l’harmonie du langage, et cette richesse d’élocution qui multiplia les ressources de la langue espagnole. Sur cette terre classique, Cervantes reprit son éducation imparfaite, et relut les bons modèles de l’antiquité. Rien n’échappait à sa curiosité. Ses ouvrages abondent en souvenirs toujours pleins de goût et d’à-propos, et ses réminiscences heureuses attestent qu’il avait médité en admirateur intelligent les chefs-d’œuvre qu’on explique dans les écoles. Cervantes avait vingt-huit ans lorsqu’il quitta l’Italie, couvert de gloire et riche de tous les trésors de l’esprit. Il s’embarqua à Naples, avec son frère Rodrigo et quelques compagnons d’armes, nobles comme lui. Il emportait des lettres de recommandation de don Juan d’Autriche, dont sa valeur lui avait fait un ami, et de don Carlos d’Aragon, duc de Sesa