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CLXIX

pédantesque, qui avait plus d’une analogie avec celle de Ronsard.

Il n’était guère possible de se moquer plus finement qu’il l’a fait de Ledesma, cet autre corrupteur de la poésie, qui faisait du divin à sa manière ; car le mot et la chose existaient dès ce temps-là dans la littérature espagnole, et les poésies á lo divino, comme on disait, sont peut-être le plus triste témoignage des excès où s’emporta le génie espagnol, sous prétexte de religion et de mysticisme.

On remarquera aussi que l’ironie s’est glissée jusque dans l’éloge de Fernando de Herrera, ce grand poëte lyrique, que Cervantes admirait sincèrement, mais dont il goûtait peu les tendances vers un idéal impossible.

La bonne humeur, la gaieté spirituelle, l’invention ingénieuse et originale, la facilité de la narration, le charme du récit et la variété des épisodes abondent dans ce poëme que certains critiques ont traité, sans le connaître, avec trop de légèreté, ou même avec un dédain insolent. L’ouvrage se recommande assez par le nom de l’auteur. La lecture en est divertissante, et de plus très-instructive, car il s’agit d’une revue des poëtes contemporains faite par un homme qui les connaissait bien et qui s’affligeait à bon droit de la décadence imminente et de l’invasion croissante du mauvais goût.

On trouvera peut-être, si l’on ne prend pas la peine d’entrer dans l’esprit de ce