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tent une oreille attentive aux révélations du grand prêtre, et qui contemplent, émerveillés, les ténèbres de l’antre, sillonnées par de rares éclairs.

Respectons la foi des croyants, et restons en plein air et en pleine lumière dans cette avenue thébaïque et olympienne où se dressent les statues des grands dieux. Que font là Rabelais et Cervantes au milieu de tous ces poëtes lyriques, épiques et dramatiques ? Assurément ils tiennent leur rang partout, et ce n’est point leur entourage qui pourrait les faire monter ou descendre. S’il y avait un panthéon pour les esprits supérieurs, ils auraient le droit d’entrer des premiers et de s’asseoir aux places d’honneur. Mais leur prééminence étant hors de cause, il s’agit de savoir pourquoi ils ont été admis, tandis qu’on a exclu Molière qui est de la même famille ! La question n’est pas oiseuse, puisqu’on prétend renverser l’ordre reçu et refaire une tradition littéraire en même temps qu’une poétique. La classification importe peu ; car il est bien difficile d’assigner des rangs aux hommes qui sortent de pair par leur intelligence, et il n’y a point de classification qui ne soit artificielle et imaginée pour les besoins d’un système. Il suffit de s’enquérir des motifs qui ont déterminé l’admission et l’exclusion.

Ces motifs sont connus : on admet des génies supérieurs et des génies de second ordre. Les premiers sont complets : outre les facultés dont l’ensemble harmonique con-