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qui montre combien leur esprit est troublé et malade. Le vrai sens des mots s’altère, il se perd ; les néologismes inutiles abondent, les locutions vicieuses passent de la conversation dans les livres, et le galimatias fleuri ou melliflu remplace le style net et concis, clair et ferme, que nos beaux esprits affectent de mépriser.

Nous avons une espèce de théologie mondaine qui a nom la science ou la philosophie religieuse et qui s’affirme en d’épais volumes, bourrés d’érudition mal acquise et encore plus mal employée, ou en de fades et langoureux romans à l’usage des oisifs et des ignorants, et des partisans d’un mysticisme mêlé de couardise et d’incrédulité. Car il ne faut point se faire illusion sur cette espèce de renaissance du sentiment religieux qu’on nous représente comme la promesse infaillible d’une réformation radicale et définitive.

D’où sortent les docteurs de ce dogme mal défini et les nouveaux évangélistes ? Du séminaire et du consistoire, ou encore de ces classes de rhétorique et de logique où l’on enseigne des riens ingénieux. Ce sont des philosophes ou des théologiens manqués, qui ont usé leur cerveau à méditer sur des questions creuses, et leur conscience à interroger un moi hypothétique sur des droits et des devoirs imaginaires. Arrachés à leurs élucubrations scolastiques par l’ambition ou par la curiosité, ou par un concours fortuit de circonstances qu’on appelait jadis le hasard, et qu’on nomme aujourd’hui plus doctement