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PREMIÈRE PARTIE

pour ma famille qui m’est fort chère depuis que je ne vous aime plus ! Vous voyez bien que je connais de sens 4 froid qu’il étoit possible que je fusse encore plus à plaindre que je ne suis ; et je vous parle, au moins, raisonnablement une fois en ma vie. Que ma modération vous plaira ! et que vous serez content de moi ! Je ne veux point le savoir ; je vous ai déjà prié de ne m’écrire plus, et je vous en conjure encore.

N’avez-vous jamais fait quelque réflexion sur la manière dont vous m’avez traitée ? Ne pensez-vous jamais que vous m’avez plus d’obligation qu’à personne du monde ? Je vous ai aimé comme une insensée. Que de mépris j’ai eu pour toutes choses ! Votre procédé n’est point d’un honnête homme. Il faut que vous ayez eu pour moi de l’aversion naturelle, puisque vous ne m’avez pas aimée éperdument. Je me suis laissé enchanter par des qualités très-médiocres. Qu’avez-vous fait qui dût me plaire ? Quel sacrifice m’avez-vous fait ? N’avez-vous pas cherché mille autres plaisirs ? Avez-vous renoncé au jeu, et à la chasse ? N’êtes-vous pas parti le premier pour aller à l’armée ? N’en êtes-vous pas revenu après tous les autres ? Vous vous y êtes exposé follement,