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entendu, je n’abuse pas de ce monde-là, car j’ai remarqué qu’on n’y accueille que les personnes qui fournissent l’occasion de dire : « J’étais avec M. de … nous nous sommes promenés avec le comte de, etc. » Ma société se compose d’un lieutenant bien malade, d’un jeune Espagnol presque mort et d’un Parisien de vingt-trois ans, aussi souffrant que deux autres.

Je suis surpris que ce temps d’exil, dont je désirais si vivement le terme, m’ait paru si court : « Tout ce qui doit finir passe vite. » Ce mot est aussi vrai que triste. Au fait, ce n’est pas sans quelques charmes que j’avais retrouvé mes habitudes provinciales. Indépendance, heures libres, travaux et loisirs capricieux, lectures au hasard, pensées errantes au gré de l’impulsion, promenades solitaires, admirable nature, calme et silence, voilà ce qu’on rencontre dans nos montagnes, et la puissance d’un si, d’un seul si en ferait un paradis. Que faudrait-il autre chose qu’une goutte de cette ambroisie qui parfume tous les détail de la vie, et qu’on nomme l’amitié ?

Vous avez vu dans les journaux les succès et les ovations de MM. Scribe et Halevy ; cela vous aura réjouie et fait sans doute un peu