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LETTRE TREIZIÈME

sonnée. Ce hasard à courir me parut d’un genre neuf. Je comptai mes quatre louis à la Destainville et retournai le premier qui se trouva sous ma main. Juge de mon bonheur, je lis dessus : Discrétion ! aussitôt l’archi-prêtresse, sans attendre ma réponse, donna ses ordres, fit défendre l’entrée à aucun étranger et se mit en devoir de me déshabiller. Sacrédieu ! dit-elle, quels poils noirs ! Comme tu es velu ! C’est plaisir encore quand ça tombe à des fouteurs aussi bien caractérisés que tu l’es ! et je lui demandai à quels signes elle voyait que j’étais bon fouteur ? — Comment ! tu ne sais pas encore ? reprit-elle. — Non, en vérité. — Eh bien ! tu peux m’en croire, je t’en parle par expérience, j’en ai tant vu ! Lorsqu’un homme a la barbe épaisse, noire ou rouge (ce sont les deux couleurs), et qu’il a l’estomac, les bras, les cuisses ainsi velus que tu les as, c’est un signe caractéristique de bon fouteur. — Et d’où vient ? lui dis-je. — Ne sais-tu donc pas que le foutre est ce qui nous donne la chaleur naturelle ? — Si fait, je le sais. — Tu dois savoir aussi que le poil ne vient qu’aux endroits les plus chauds de notre corps. — Assurément. — Or, puisque le foutre est ce qui donne la chaleur et que le poil ne pousse qu’où il y en a une extrême… — Ah ! c’est juste, m’écriai-