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LETTRE TREIZIÈME


mais je puis t’assurer que ces duègnes sont encore à rencontrer des Lucrèce. Comme la plus grande discrétion règne dans ces sortes de lieux, on y rencontre jusqu’à des filles de bonnes maisons, qui viennent s’y faire trousser, accompagnées de leurs femmes de chambre ; vous les enfilez sans les connaître, et les parents vous les donnent après en mariage comme pucelles.

Il y a des putains et des rivettes attachées à ces établissements pour le service de l’un et l’autre sexe. Je visitai hier celui tenu par une nommée la Destainville, rue des Bons-Enfants, derrière le Palais. Cette femme est douce, honnête et reçoit indistinctement tous ceux qui payent bien ; elle a la réputation d’être excellente tribade. Voici le portrait des prêtresses de sa maison :

Destainville, archi-prêtresse, quarante-cinq ans de service ; taille basse, nez carlin, langue extraordinairement longue, fossettes aux joues et au menton, possédant une grande érudition.

Flore, belle et fraîche, comme la déesse de ce nom, les formes les plus séduisantes du monde, un con dont les lèvres vermeilles semblent vous demander un baiser.

Dorothée, douze à treize ans, mignature pour le fini des contours.