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trône fut occupé par un de ses fils, homme méchant et pervers, impie à outrance, ennemi de la paix et rejetant la doctrine de la prédication de l’évangile. Il manda à l’évêque[1] Addé pendant qu’il interprétait au peuple, assemblé dans l’église, les oracles des saintes écritures : « Fais-moi des tiares en or comme tu en faisais auparavant à mon père ». Addé n’y consentit pas et renvoya le messager en disant : « Je n’abandonne pas le ministère du Christ qui m’a été confié par l’apôtre Thaddée, son disciple, pour faire des tiares à un homme injuste ». Lorsque le roi vit qu’Addé ne consentait pas à faire ses volontés, il envoya des hommes qui lui brisèrent les jambes, lorsqu’il s’asseyait dans l’église et expliquait au peuple les livres saints. En mourant, Addé fit jurer Philote et Abshlama : « Enterrez-moi dans ce temple où je meurs pour la vérité ». Philote et Abshlama s’empressèrent d’acquiescer à son désir. On l’enterra devant la porte du centre, entre les hommes et les femmes. Toute l’église et la ville entière furent plongées dans un deuil

    mois qu’arriva la mort d’Abgar selon notre histoire, avant qu’il reçut la réponse de sa seconde lettre à l’empereur Tibère. Or, comme ce dernier mourut le 16 mars de l’an 37, et que l’apôtre Thaddée avait quitté Édesse le 14 d’avril précédent, la mort d’Abgar doit être arrivée dans cet espace de onze mois, et probablement vers la fin de l’année 36. Ce qui est attesté d’ailleurs par tous nos historiens qui assignent pour le règne d’Abgar 38 ans commençant l’année 2 avant l’ère vulgaire. La Chronologie d’Édesse lui attribue aussi 37 ans et un mois de règne, mais en en reculant le commencement, elle en met la fin l’année 45.

  1. Le syrien ou peut-être son traducteur anglais omet la dénomination évêque. Quant à cette histoire du martyre d’Addée, Moïse de Khorène l’a presque copiée mot à mot (liv. II, 34). Quelques historiens byzantins (Cedrenus et le Porphyrogène entre autres) croient avec les Syriens que le fils d’Abgar et son successeur fut aussi bon chrétien que son père : tandis que le fils de ce dernier nommé aussi Abgar serait mécréant et persécuteur des chrétiens ; il aurait régné selon la chronologie Édesséenne de l’année 65 à 86 ; et ce serait dans ce même espace qu’Addée fut martyrisé. Cela est prouvé, selon Cureton par un monument très-ancien, d’un manuscrit autographe des Évangiles par Addée même écrit vers l’année 78 (Cf. Assemani Bibl. Orient. II, 486). Cependant selon notre histoire la mort d’Addée ne suivit que de trop près celle d’Abgar.