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LETTRE À M. ERNEST RENAN

de l’antiquité sur ce côté de l’Atlantique. Bien des fois, lorsque des doutes entraient dans mon esprit au sujet de l’authenticité de l’inscription, je m’étais dit : se non e vero, e bene trovato, et cela parce qu’en vérité je crois encore fermement que les Phéniciens ou plutôt les Carthaginois ont fait de fréquents voyages de long de la côte occidentale d’Afrique, surtout à l’époque où trente mille de leurs nationaux furent établis, dispersés entre les colonnes d’Hercule et l’ile de Cerné, dont la position est encore indéterminée, alors qu’ils possédaient près de trois cents villes de commerce[1], des comptoirs probablement, sur cette même côte, et pouvaient réunir 350 galères à cinq rangs de rames, sans compter les autres navires, 42,000 combattants et 105,000 matelots.

J’admets facilement qu’ils ont dû éprouver plus d’une fois de la difficulté à vaincre le courant du golfe de Guinée, soit à l’aller, soit au retour, avec leurs légères embarcations de commerce. Or, si l’on calcule la vitesse qui peut être imprimée à l’un de ces anciens bateaux, emporté vers l’Ouest par la branche méridionale du courant équatorial, à l’époque de sa plus grande vélocité, surtout s’il est aidé par l’alizé, ce qui ne peut guère manquer — on reconnaitra qu’il ne faudrait pas plus d’un mois, moins peut-être, pour que, même sans voiles et sans grande force de rames, un pareil

  1. Georg. de Horn. De originibus Americanis, pag. 19.