nuque fine jaillissait une chevelure charmante, d’un blond si tendre qu’elle s’argentait par places, et que, tout d’abord, dans l’ombre, Robert avait cru cette jeune tête blanchie prématurément. La coiffure d’ailleurs était originale. Cette masse de cheveux, dont s’échappaient des frisons impalpables, se tordait en une seule natte, qui nimbait la tête, tandis que, des deux côtés, à la hauteur des tempes, une touffe courte bouclait, allégeant et élargissant l’ensemble. Sans doute, c’était à cause du poids de cette natte, ou, encore, par coquetterie, pour la montrer, que Jocelyne était venue sans chapeau.
Cependant, Nauders, que la pièce n’intéressait guère, se tournait à demi pour observer, de son regard supérieur et narquois, la physionomie contemplative de Robert.
Son mouvement ayant appelé l’attention du jeune homme, il lui fit signe, d’un coup de menton souriant, dont la claire signification était :
« Chic, ma pupille… Hein ! Qu’en dites-vous ? »
Un sentiment désagréable envahit Clérieux. Il se souvint tout à coup de potins jadis écoutés d’une oreille indifférente, et suivant lesquels Jocelyne eût été la maîtresse du puissant financier. Cela l’ennuyait maintenant, sans qu’il sût pourquoi. Hochant la tête, comme pour dire : « Ma foi, j’attends de la voir », il parut s’absorber dans les péripéties d’au delà de la rampe.
Mlle Monestier n’était pas exactement la pupille de Jérôme Nauders, — ou plutôt de J. Nauçlers, suivant la signature et les cartes de visite de cet homme, qui, détestant son prénom, ne souffrait pas qu’on le lui rappelât.
Lorsque la jeune fille, à la suite d'un drame mal connu, resta seule dans la vie (il y avait de cela environ huit ans), Nauders fut nommé administrateur de la succession embrouillée que laissaient les parents de Jocelyne. Ami intime du père, ayant toujours accueilli l’enfant comme la compagne préférée de sa propre fille Huguette, déjà connu d’ailleurs pour le génie financier qui faisait de lui l’un des plus heureux brasseurs d’affaires, il était tout désigné pour ce rôle.