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le cœur, vous vous en expliquerez demain. Mais c’est une erreur, un malentendu… Laissez-moi vous en excuser auprès de la comtesse…

— M’excuser !… »

Elle bondit en arrière, arrachant ses deux frêles mains d’une étreinte pourtant volontaire et forte, — plus forte de tout le prestige qu’avait sur son cœur ce mari qu’elle adorait. Renaud insista, d’un ton cette fois impératif :

— « Vous n’allez pas gâter cette fête, la fête de notre Micheline…

— Notre Micheline !… Ah ! ma fille, ma pauvre petite fille !…

— Elle divague… C’est une crise de somnambulisme, » prononça dédaigneusement Mme de Ferneuse. Vous savez, Valcor, on ne doit pas discuter avec les fous. Je me retire. »

Le marquis protesta, mais pour la forme, jugeant à peu près de même, et craignant un scandale pire si l’on résistait à la volonté extravagante de Laurence.

Cet homme, tellement autoritaire et sûr de lui, paraissait — pour la première fois peut-être de son existence — réellement embarrassé. Il eut, entre les deux femmes, un mouvement d’hésitation. Que devait-il faire ? Allait-il offrir le bras à la comtesse, pour la mettre — ce qu’il trouvait monstrueux — hors de chez lui ?

Elle vint à son secours avec une aisance et une ironie où elle gardait le beau rôle.

— « Ramenez Laurence, mon ami. Elle a plus besoin de votre appui que moi. Et envoyez-moi mon fils, en lui disant que je suis un peu souf-