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front du côté du marquis, avec un air d’attention profonde, comme si elle eût voulu saisir jusqu’aux moindres inflexions de sa voix.

— « Voilà un flirt qui me paraît sérieux, » murmura José Escaldas.

— « Un flirt ! » répéta M. de Plesguen, choqué du mot. « Pour le compte de leurs enfants, alors. Micheline et Hervé sont destinés l’un à l’autre. Leurs fiançailles vont être bientôt officielles.

— Hé ! » riposta l’autre, « que les jeunes gens s’aiment, cela va sans dire. Mais pourquoi voulez-vous que les parents aient dit leur dernier mot ? Voyez… Ne forment-ils pas un beau couple ? »

Pour la troisième fois, le maître de la maison et sa compagne revenaient à proximité. Une gerbe électrique éclaira en plein le visage et la silhouette de Renaud. C’était vrai : à son aspect seul, on ne pouvait douter qu’il ne fût quelqu’un. Sa taille haute, élancée, aux épaules larges, se dessinait sous l’habit avec une vigueur élégante. Comme il était nu-tête, on constatait la richesse drue de ses cheveux foncés, à peine givrés de blanc aux temps. Une barbe brune, en pointe, achevait bien le dessin général du crâne vaste, des joues fines, et contribuait à l’énergie martiale de la physionomie. Les traits, pétris de volonté, eussent été trop marqués de sécheresse peut-être, sans la flamme séductrice du regard. Même ici, ce soir, dans l’artificielle et inégale clarté, on devinait quelle puissance de suggestion flottait dans ces prunelles qui, d’un bleu velouté au grand jour, restaient maintenant