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Cependant, les deux hommes qui s’étaient isolés, pour fumer, dans l’air délicieux du soir, réunis seulement par le hasard de cette fantaisie, semblaient n’avoir guère d’idées communes à échanger.

Celui dont ils parlaient encore, et qui, pour la seconde fois, passait devant leurs yeux, était pourtant, comme l’exprimait avec chaleur son cousin, un personnage peu banal, et qui, à lui seul, pouvait fournir un sujet intéressant à leurs propos.

Le marquis de Valcor marchait lentement, à côté d’une femme qui, à la distance où la voyaient les deux observateurs, et parmi les jeux variés de l’ombre et de l’éclairage électrique, paraissait presque jeune et assurément encore belle.

C’était la comtesse Gaétane de Ferneuse. Veuve, elle habitait toute l’année dans ses terres, qui touchent à celles de Valcor. Depuis des siècles, une amitié traditionnelle unissait les deux maisons. On retrouve, à travers l’histoire, côte à côte, comme frères d’armes dans les plus célèbres combats, des Ferneuse et des Valcor.

Sur le décolleté de sa robe en mousseline de soie crème incrustée de chantilly noir, la comtesse avait jeté une écharpe en duvet neigeux. Sa tête blonde, où tremblait le vol d’une libellule en diamants, émergeait hors de cette mousseuse écume, comme celle d’une sirène dans la brisure d’une vague. Son visage blanc et immobile, aux larges yeux fixes, prêtait à cette illusion. Son expression était celle de la tristesse et de la fierté. Cependant, elle inclinait légèrement le