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à force d’aimer

anciennes, la faisait trembler lorsqu’elle atteignit la porte de la familière maison.

Mme Giraudet ne lui parla de rien.

Tout ce qu’Hélène avait ressenti ou deviné durant son existence ne pouvait l’aider à lire dans le cœur d’Horace. Tantôt un mot furtif, un regard, une pression de main la transportait jusqu’au ciel de ses rêves ; elle croyait, elle adorait. Tantôt la sombre concentration de cet homme semblait le hausser à des distances infinies d’elle-même, et la laissait dans une région de misère, d’infériorité, où rien ne lui restait, pas même le sentiment de sa propre dignité, ni la vivante flamme de son propre amour.

Parmi ces alternatives, sa santé physique et morale s’ébranlait. Un scintillement fiévreux fit étinceler péniblement son regard dans son visage aminci et pâle. Une frémissante nervosité remplaça le calme de ses attitudes, la sage ordonnance de ses actions. Elle se détraquait dans l’attraction d’une personnalité trop puissante, comme une boussole sous l’influence d’un trop fort aimant. Son cœur simple déviait de ses tendances normales en d’affolantes sensations. Elle en arrivait à douter de son amour maternel, à se demander si elle n’en voulait pas à son fils d’être l’obstacle entre elle et cet homme, sans qui elle ne comprenait plus la vie.

Tout n’était pas involontaire dans le mal que