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à force d’aimer

combinée avec un très vif sentiment maternel, suffisait à occuper ou plutôt à tromper une nature faite pour les tendresses ardentes et complètes, les tendresses où les sens et l’imagination s’activent tout autant que le cœur. Puis, par le dépaysement à Clermont, par l’impossibilité de toute rencontre avec son ancien amant, les cendres qu’un souffle rallumait autrefois s’étaient pour de bon refroidies. Et peu à peu, dans la monotonie des jours, des occupations toujours pareilles, presque machinales, le vide s’était fait. Mais, à mesure que le passé s’anéantissait, tournait à la chose morte, et, ne faisant plus partie de la chair, remontait dans la vague intellectualité, une confuse aspiration vers de nouvelles sources d’émotion et de vie soulevait cette âme qui ne pouvait connaître l’inactivité sentimentale. Le mystère entrevu dans le cœur de son fils la désola pour le présent et l’effraya pour l’avenir. Une âpre nostalgie lui vint de sa jeunesse déclinante et inutile…

Ce fut alors que, regardant autour d’elle, Hélène s’aperçut qu’elle était aimée.

Un professeur du lycée de Clermont, de son âge à peu près, venait deux fois par semaine faire un cours à sa première classe. Elle l’avait connu chez les Giraudet. La doctoresse professait pour ce jeune homme autant d’admiration que pour son amie Mlle Marinval, mais par des raisons dif-