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à force d’aimer

quand elle apprendrait que pour accepter le nom de M. Vallery, René devrait déchaîner contre lui et, par conséquent, contre Huguette, les plus douloureuses catastrophes, et qu’il ne pouvait aspirer à la posséder elle-même sans devenir traître à son parti et sans exposer sa nouvelle famille à de redoutables représailles ?

« Elle me comprendra, » se disait-il. « Son âme vaillante verra clairement mon devoir et me communiquera la force de l’accomplir. Oh ! si elle promettait de m’attendre !… Si elle parlait d’avenir et d’espoir… Il m’est interdit d’aller à elle… Mais elle, plus tard, pourra venir à moi, si son amour ne faiblit pas, si elle persiste dans son rêve de dévouement humanitaire.

« Ah ! » pensait-il encore, « je servirai si bien ma cause, je ferai mon œuvre si grande et si noble, qu’il n’en coûtera rien à sa fierté de quitter les splendeurs du luxe pour suivre à mes côtés l’austère chemin où je marcherai ! »

Exalté par de tels rêves, soulevé d’espoir, d’amour, d’héroïque volonté, René franchissait à l’heure dite la petite porte, derrière laquelle il fut accueilli par les sourires tristes et tendres des deux jeunes filles.

Tout de suite, à la façon un peu solennelle dont Germaine lui tendit la main, au regard dont elle le pénétra, le jeune homme sentit qu’elle était montée au même diapason que lui, qu’elle