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à force d’aimer

— « Vous savez que ce sont là des plantes dangereuses, » dit Horace aussitôt qu’il l’eut saluée.

— « Mais je les crois bienfaisantes, au contraire, » fit-elle avec un sourire délicieux et des yeux tristes. « N’apaisent-elles pas les battements trop tumultueux du cœur ?

— Oui, mais elles peuvent aussi les suspendre tout à fait.

— Qu’importe ! » reprit-elle. Et, songeant à l’amour qui la minait, elle ajouta : « Il est des poisons qui sont si doux !

— Pas celui-là, » dit vivement Horace. « La digitale cause dans l’organisme…

— Bah ! » interrompit Hélène, « vous parlez en savant. Ce n’est pas cela que je veux dire. Mais regardez… N’est-ce pas admirable ? »

Elle séparait des autres une des longues tiges et l’élevait de la main droite. La lourde cascade des calices incarnats tombait somptueusement. Et le geste était aussi charmant que la fleur était splendide.

Horace fut profondément remué. Quelque chose d’inquiétant s’ajoutait à la beauté d’Hélène et en aiguisait l’impression sur ses sens et sur son cœur. Était-ce donc vrai qu’elle préférerait la mort à son étreinte ?… Il s’approcha, très pâle, et prononça presque tout bas :

— « À quoi songiez-vous en cueillant ces fleurs ? »